Comment orchestrer en MAO

Comment orchestrer ? La réponse existe depuis des décennies dans des traités épais et détaillés.

Mais…

Est-ce que ça marche pour la MAO ?

La réponse est non. Et c’est là que ça devient intéressant.

Certaines règles restent vraies, d’autres sont fausses, et de nouvelles règles apparaissent.

Ce qui est vrai en orchestration acoustique est souvent faux en MAO

De plus, les règles vont également dépendre de votre banque de son, du temps de programmation disponible, et de votre talent de mixeur.

Hans Zimmer, possède probablement le plus puissant studio de MAO du monde. Pourtant, il utilise des musiciens acoustiques constamment.
Ça fait réfléchir, n’est-ce pas ?

Soyez modeste, acceptez ce qui est possible et ce qui ne l’est pas.

Voici des règles de base.
Il faut les prendre comme une sorte de guide, qui devra être interprété au cas par cas.

Règle 1/ Chaque partie doit bien sonner, en autonomie.

Cette règle vient de la musique classique. Toutes les grandes orchestrations sont équilibrées section par section.
Ça s’explique par le phénomène acoustique d’une salle de concert.
La musique en salle est beaucoup plus multidirectionnelle que la musique enregistrée (aplatie).
Si une section est déséquilibrée, elle ne peut pas être rattrapée par une autre qui ne se localise pas au même endroit.

Les orchestrateurs classiques ont ce réflexe.

En MAO, on peut souvent s’en tirer au mixage, mais sur la durée, vous aurez de meilleurs résultats avec des sections équilibrées.

Règle 2/ Les niveaux de puissance

Ne pas confondre volume et intensité !

Le volume c’est l’épaisseur du son, sa richesse, sa largeur.
L’intensité, c’est le niveau sonore en db.

Typiquement, une flute a un énorme volume dans le grave et une faible intensité.
Dans l’aigüe, elle a une forte intensité, et un faible volume.

Dans un orchestre, il faut gérer les intensités pour que l’on entende les instruments qui jouent.
(Dans mon exemple, une flute dans le grave, à coté d’une section de cuivre qui joue fort, sera inaudible)
Par contre, en MAO, par le mixage, on peut compenser, et inventer, les intensités.
Une flute peut devenir plus puissante qu’une trompette.

C’est un avantage, mais aussi une invitation à faire n’importe quoi.

Avoir des notions d’intensité vous évite de perdre toute crédibilité acoustique.

En général, on aura cette classification :

1/ Les bois
Bassons, Clarinettes, Haubois, Flutes
(Les piccolo sont très puissantes dans l’aigüe)

2/ Les cordes
Contre-Basses, Violoncelles, Altos, Violons
(Très flexibles en intensité, mais trop de cordes dans un mix peut faire perdre de la clarté)

3/ Les cors
(Je les différencie des cuivres, car leur son est plus doux)

4/ Les cuivres
Tubas, Trombones, Trompettes

5/ Les percussions
Vaste famille, (le piano est un instrument à percussion).
Les timbales, cymbales, gongs, caisse claire, grosse caisse, couvrent n’importe quel orchestre facilement.
Ils peuvent jouer extrêmement doucement également.

Lorsque l’on écrit pour une famille d’instrument, on respecte les tessitures naturelles.

Sauf effet spécial, on écrira le hautbois plus haut que la clarinette, l’alto plus haut que le violoncelle, le trombone au dessus du tuba, etc.

La principale différence entre MAO et acoustique

En acoustique les doublages sont les bienvenus.

En mao, les doublages perdent souvent l’identité des instruments doublés

Comme dit plus haut, dans une salle de concert, le son est spatialisé. Il est donc plus creux.

Sur un enregistrement, il est aplati, et donc la fusion acoustique se fait mal.

Deux instruments superposés ne sont souvent plus ni l’un, ni l’autre.

Le mixage permet d’équilibrer les intensités, sans avoir besoin de renforcer, comme dans une salle de concert.

Exemple, si les cuivres jouent fort, une orchestration acoustique devra utiliser tout le reste de l’orchestre pour équilibrer l’intensité.
Sans quoi, l’auditeur ressentira les cuivres « en dehors » du groupe.

Dans un enregistrement, ça n’a plus de sens, et c’est souvent contre-productif.

On risque d’avoir une sonorité « paquet », un peu comme un orgue, où tout devient uniforme.

Il vaut mieux choisir un équilibrage des volumes, avec peu de mélange de timbre (pour garder l’identité de l’instrument), et le mixeur se chargera facilement d’équilibrer les intensités.

Un petit conseil personnel

Les musiciens jouent mieux quand ils ne s’ennuient pas.

Beaucoup de compositeurs ne se préoccupent pas des musiciens.

J’ai remarqué, et vérifié, qu’un musicien concentré joue mieux qu’un musicien qui s’ennuie.

Dans les orchestrations d’élèves, j’entends souvent des parties instrumentales secondaires qui sont ennuyeuses.

Il me semble qu’une bonne orchestration ne doit pas contenir d’éléments de faible intérêt.

Mieux vaut réfléchir à s’en passer.

Je ne sais pas expliquer pourquoi, mais je constate que c’est souvent vrai en MAO également.
Je suppose que c’est parce que c’est une lutte contre la fainéantise.
Ce principe pousse à être soigneux et perfectionniste.
Si on s’oblige à rendre toutes les parties intéressantes, l’auditeur s’en rendra compte, consciemment ou non.

Et si on mélange electro et acoustique ?

Dès qu’on mélange de l’electro dans un orchestre, il faut faire beaucoup de place.

Le « fondu » n’aura pas lieu. C’est un combat qui se règle au moment du mixage, à grand coup de plug-in.

En résumé

En live, l’orchestre sonne plus creux

En enregistrement, il sonne plus « paquet ».

En MAO, c’est pire !

Respectez les sections, et la hiérarchie des instruments.

Faites des partitions intéressantes dans le détail.

Si on mélange, synthé et acoustique, alors, il faut libérer de la place.

Pour progresser

Allez au concert, et comparez la sensation dans la salle avec celle du disque.

Regardez sur les partitions d’orchestre ce qui se passe « derrière », et comment se font les équilibres, et les différentes sonorités que vous aimez.

Et n’oubliez pas, que quelle que soit votre banque de son, l’orchestration en MAO et l’orchestration acoustique… c’est pas pareil.